Editorial de : Jean Etèvenaux
À la suite de notre soirée du jeudi 30 mars, Delphine Baya, qui avait amené plusieurs de ses élèves pour présenter un livre concernant l’histoire du 2e arrondissement, a résumé ce moment comme suit.
« M. Jean Étèvenaux, journaliste, historien et écrivain, a d’abord donné la parole à Mme Denise Favetta-Novel, directrice du lycée des métiers Japy, qui a fait une brève présentation historique de son lycée. Ensuite, M. Denis Broliquier, maire du 2e arrondissement, a expliqué les raisons pour lesquelles, il a soutenu le projet des élèves. Quatre élèves, Kevin, Kheir-Dine et Yanis, de seconde des métiers de la relation aux clients et usagers, travaillent sur le 6e arrondissement de Lyon durant la Première Guerre mondiale et enfin Mélinda, élève de Première accueil relation clients et usagers, travaille sur le 7e arrondissement de Lyon.
« J’ai été agréablement surprise de voir mes élèves s’exprimer avec aisance, de dire ce qu’ils ont appris lors de leurs travaux de recherche sur l’histoire de la ville de Lyon et de ses arrondissements et aussi à partir de la consultation des archives privées, telles celles de la Fondation Berliet. Les élèves ont également souligné ce qu’ils ont retiré des interventions des personnalités suivantes : M. Jean-Dominique Durand, adjoint au maire délégué aux Anciens combattants, à la Mémoire et au Patrimoine, M. François Isaac, neveu de Mme la députée honoraire Bernadette Isaac-Sibille, M. Jean Étèvenaux, M. Sylvain Bissonnier, de l’Office national des Anciens Combattants et Victimes de Guerre, et Mme Monique Chapelle, vice-présidente de la Fondation Berliet.
« Enfin ce fut le tour de Mélinda de conclure son intervention, en disant que ce travail de recherche et de narration est bénéfique pour elle et ses camarades car ils ont tous découvert le rôle joué par la ville de Lyon durant les deux grandes guerres mondiales. Ces recherches leur ont permis de s’approprier l’histoire de leur ville et, grâce à ces recherches, elle est désormais fière d’être française.
« Cette conclusion de Mélinda et les interventions des trois autres élèves ont été pour moi une belle reconnaissance car l’un des objectifs de l’Association des amis de l’Afrique francophone étant de promouvoir l’image de la France et de transmettre aux jeunes les vraies valeurs républicaines. »
L’Histoire au fil des 15 premiers jours de juin
par Gérard Chauvy
Cela est arrivé en juin. De quel personnage ou événement s’agit-il ?
Ce 1er juin 1898, quel établissement, qui incarne l’élégance et le luxe feutré synonymes de l’art de vivre à la française, est inauguré ? Indice : hôtel.
Ce 2 juin 1675, les portes du couvent des carmélites se referment sur la première maîtresse de Louis XIV. Quel est son nom ? Indice : Louise de la Miséricorde.
Ce 3 juin 1944, quel tournant politique se joue à Alger et constitue l’ultime étape avant l’éviction du régime de Vichy ? Indice : pouvoir.
Quel événement politique a eu lieu le 4 juin 1936 ? Indice : Front populaire.
Ce 5 juin 1921, la France perd un de ses plus grands auteurs de vaudeville. De qui s’agit-il ? Indice : Le dindon.
Sur la côte française, quel événement décisif se déroule le 6 juin 1944 ? Indice : J.
Ce 7 juin 1520, quels rois de France et d’Angleterre se rencontrent non loin de Calais ? Indice : Drap.
Le 8 juin 1876, quelles dépouilles ramène du Royaume-Uni le navire Le Samphire ? Indice : famille royale.
Pourquoi le 9 juin 1944 est-il un jour de deuil pour la ville de Tulle ? Indice : Das Reich.
Quel événement historique représente le 10 juin 2007 dans l’histoire du tgv ? Indice : est de la France.
Ce 11 juin1726, quel ancien précepteur du roi devient premier ministre de Louis XV ? Indice : cardinal.
Ce 12 juin 1982, quel événement monétaire, au goût de déjà vu, survient en France ? Indice : franc.
Ce 13 juin 1998 marque la disparition de quel grand navigateur français ? Indice : un homme à la mer.
Quelle recette voit le jour, ce 14 juin 1800, à l’issue d’une bataille ? Indice : poulet.
Ce 15 juin 1898, la voiture était particulièrement à l’honneur. Pourquoi ? Indice : salon.
Réponses
1er juin 1898 : « Une petite maison à laquelle je suis fier d’avoir attaché mon nom », voici comment César Ritz décrivit son hôtel le jour de son inauguration. L’hôtel Ritz est considéré comme l’un des plus beaux et des plus grands hôtels au monde avec ses 159 chambres et son célèbre bar Hemingway, où le fameux Bloody Mary fut créé pour l’écrivain.
2 juin 1675 : La duchesse de La Vallière, après avoir appris la liaison de Louis XIV avec Madame de Montespan, décide de se retirer au couvent. Le 3 juin 1675, elle prononcera ses vœux perpétuels, prenant le nom de Louise de la Miséricorde.
3 juin 1944 : Le général de Gaulle devient chef du gouvernement provisoire. Le Comité français de libération nationale (CFLN), créé le 3 juin 1943, et quelques mois coprésidé par les généraux Giraud et de Gaulle, est remplacé par le Gouvernement provisoire de la République française un an après, ce 3 juin 1944 et le général de Gaulle en devient le seul président.
4 juin 1936 : Une grande figure du socialisme, Léon Blum, est désigné président du Conseil du Front populaire. Ses réformes ont représenté de grandes avancées sociales (congés payés, femmes au gouvernement, réduction du temps de travail, etc.).
5 juin 1921 : Une minute de silence pour cet auteur à qui nous devons tant de fous rires et de bons moments. Georges Feydeau rend l’âme à 58 ans, victime de la syphilis. Il s’est essayé à tous les genres comiques. Ses plus grands succès sont joués dans le monde entier : Tailleur pour dames, Monsieur chasse, Un fil à la patte, Le dindon, La dame de chez Maxim’s, La puce à l’oreille et tant d’autres.
6 juin 1944 : L’expression Jour J — transcription de l’anglais D-Day — est aujourd’hui devenue, dans le vocabulaire quotidien, un terme irrémédiablement lié à la date du 6 juin 1944. La bataille de Normandie débute ce jour-là par le débarquement et le parachutage des premières troupes alliées sur les plages de l’ouest du Calvados et de l’est du Cotentin et dans leurs environs.
7 juin 1520 : Les rois de France et d'Angleterre se rencontrent du 7 au 24 juin 1520 à proximité de Calais. Cherchant des alliances contre Charles Quint, François Ier se tourne vers Henry VIII. Leur entrevue se déroule dans un camp de toile d'un luxe inouï. François 1er, dans le désir d'éblouir son hôte, s'est offert une tente de drap d'or doublé de velours bleu. D'où le surnom de Camp du Drap d'Or qu'a gardé cette rencontre.
8 juin 1876 : Le navire Le Samphire ramène de Grande-Bretagne vers le port d’Honfleur huit cercueils contenant les restes de la famille royale d’Orléans dont ceux de Louis-Philippe et de Marie-Amélie morts en exil. Ils seront transportés à la chapelle royale Saint-Louis de Dreux, nécropole de la famille d’Orléans, située dans l’enceinte du château de Dreux.
9 juin 1944 : Sous les yeux de la population, 99 otages sont pendus aux réverbères et aux balcons de la ville par les SS de la division Das Reich. Après une offensive des Ftp, les 7 et 8 juin 1944, l'arrivée de ces éléments SS contraint les maquisards à évacuer la ville. Le 9 juin 1944, après avoir raflé les hommes de seize à soixante ans, les SS et des membres du Sipo-SD vouent, en représailles, 120 habitants de Tulle à la pendaison, dont 99 sont effectivement suppliciés.
10 juin 2007 : Metz, Strasbourg et Nancy ont accueilli leur premier train à grande vitesse. Le 10 juin 2007 est une date historique pour tout l’est de la France : celle de sa connexion au réseau à grande vitesse français. Le premier tgv est-européen quitte la gare de l’Est, à Paris, mettant Strasbourg à 2 h 20 de la capitale. Depuis cette date, le tgv relie les principales villes de l’est de la France au reste du réseau hexagonal, jusqu’à l’Allemagne, la Suisse et le Luxembourg.
11 juin 1726 : André-Hercule de Fleury (73 ans) devient Premier ministre de Louis XV en remplacement du duc de Bourbon. Recevant, comme avant lui les Premiers ministres Richelieu, Mazarin et Dubois, le chapeau de cardinal, il gouverne le pays avec sagesse jusqu'à sa mort, le 29 janvier 1743, à l'âge de 90 ans — cela fait de lui le plus vieux Premier ministre qu'ait eu la France.
12 juin 1982 : Le franc subit une dévaluation de 5,75 % au sein du système monétaire européen, et prix et salaires sont gelés jusqu’au 31 octobre. On peut lire dans la presse : « Après une période de grâce pour le Parti socialiste, suite à l’élection de François Mitterrand à la présidence de la République et à l’annonce de nombreuses mesures sociales, la France semble aujourd’hui être entrée dans une période de rigueur. »
13 juin 1998 : Marinier pilote de l’aéronautique navale, puis officier de marine jusqu’au grade de capitaine de vaisseau, le plus prestigieux des navigateurs français, Éric Tabarly, périt en mer d’Irlande alors qu’il convoyait en équipage Pen Duick pour un rassemblement de voiliers. Il tombe à l’eau pendant la nuit, il n’était pas attaché et ne portait pas non plus de gilet de sauvetage.
14 juin 1800 : Beaucoup d’hommes ont perdu la vie à Marengo. Mais ce jour fête aussi une naissance : celle du poulet Marengo, devenu recette traditionnelle française et qui porte le nom de cette bataille gagnée par l’armée de Napoléon Bonaparte dans le nord de l’Italie. En l’honneur de cette victoire, son cuisinier improvise un plat de viande à base de poulet et d’une sauce qu’il appela sauce Marengo.
15 juin 1898 : Le premier Salon de l’automobile ouvre ses portes le 15 juin 1898 dans les jardins des Tuileries, à l’initiative de l’Automobile Club de France ; il rassemble 269 exposants dont 77 constructeurs et accueille environ 140 000 visiteurs. Les grandes marques automobiles de l’époque telles que Peugeot, Panhard & Levassor, Benz ou Daimler y sont représentées.
Des livres pour comprendre l’Élysée et sa conquête
La ligne finale de l’élection présidentielle amène à s’interroger sur l’Élysée. Qu’est donc ce bâtiment, pourquoi veut-on s’y installer et comment y vit-on ? Est-il d’ailleurs représentatif de la France et fournit-il en quelque sorte un modèle ? Quelques livres aident à apporter diverses réponses à ces questions.
Grâce à Bernard Brigouleix et Michèle Gayral, on avance dans la connaissance du mythique palais avec L’Élysée. Vérités et légendes (Paris, Perrin, 2017, 240 pages). François d’Orcival [Amaury de Chaunac-Lanzac, dit] dévoile de multiples Histoires de l’Élysée (édition revue et augmentée, Paris, Perrin, 2017 [édition originale : Le Rocher, 2012], 608 pages). Georges Valance, lui, fait revivre un président qui redevint ensuite chef du gouvernement : Poincaré (Paris, Perrin, 2017, 496 pages). Enfin, François d’Orcival se penche sur L’Élysée sous l’Occupation (édition revue, Paris, Perrin, 2017 [édition originale : Robert Laffont, 2011], 320 pages).
Il est intéressant de revoir comment se sont déroulés les divers septennats et quinquennats. Raphaël Piastra rappelle qui ont été Les présidents de 1870 à nos jours (Paris, Eyrolles, 2017 [1re édition : 2012], 192 pages). Gérard Courtois, lui, fait revivre les Parties de campagne. La saga des élections présidentielles (Paris, Perrin, 2017, 352 pages. Sous la direction d’Alexis Brézet et de Solenn de Royer, on contemple avec mélancolie Le deuil du pouvoir. Les cent derniers jours à l’Élysée (Paris, Le Figaro / Perrin, 2017, 320 pages). Plus générale-ment, sont retracées, sous la direction de Pierre Bréchon, Les élections présidentielles sous la Ve République (Paris, La Docu-mentation française, 2013, 216 pages).
Concrètement, Isabelle Flahault et Philippe Tronquoy s’efforcent de présenter Le président de la République en 30 questions (nouvelle édition, Paris, La Documentation française, 2017 [1re édition : 2012], 104 pages). Grâce au n° 397, mars-avril 2017, de Cahiers français, on suit La Ve République et ses évolutions. Pierre Servient, lui, étudie Les présidents et la guerre 1958-2017 (Paris, Perrin, 2017, 448 pages). En revanche, Olivier Rouquan, convaincu de la nocivité du système actuel, veut en quelque sorte En finir avec le Président ! (Paris, François Bourin, 2016, 126 pages).
Quant à la réalité à laquelle sera confronté le nouvel élu mais qui peut aussi déterminer le choix des électeurs, trois études en proposent une approche descriptive. Il s’agit, tout d’abord, de France 2017. Les données clés du débat présidentiel (Paris, La Documentation française, 2016, 152 pages). Ensuite, Dominique Borne, Olivier Feiertag, Pascale Goetschel et Magali Reghezza-Zit proposent leurs Regards sur la France d’hier à aujourd’hui (Paris, La Documentation française, 2017, 216 pages). Enfin, Virginie De Luca Barusse décrypte La population de la France (Paris, La Découverte, 2016, 180 pages).
Terminons par une réflexion sur le demi-siècle écoulé, avec Jean-Pierre Le Goff qui s’interroge sur La gauche à l’agonie ? 1967-2017 (Paris, Perrin, 2017, 352 pages). Sous le pseudonyme de Tonvoisin, un observateur satirique affirme que nous sommes Gouvernés par des cons (Paris, Pygmalion, 2017, 142 pages). Pour terminer, une petite comparaison avec un voisin tout proche et néanmoins fort différent fournit à Pierre Cormon l’occasion d’expliquer La politique suisse pour les débutants. Comment les choses fonctionnent dans cet étrange pays où l’on peut facilement vivre sans connaître le nom du président mais où l’on vote sur tout et n’importe quoi (Genève, Slatkine, 2016, 88 pages).
Jean Étèvenaux
Les deux guerres mondiales en bd
Les bandes dessinées historiques se sont beaucoup multipliées, qu’elles s’efforcent de reproduire ce qui s’est déroulé dans un passé plus ou moins lointain ou qu’elles s’inspirent de faits et personnages ayant existé pour construire des récits dont l’aspect romanesque ne nuit pas à la mise en valeur des époques antérieures. Comme dans la littérature traditionnelle, cela peut donner d’excellentes rétrospectives permettant de mieux comprendre d’où nous venons. La Première et la Seconde Guerre mondiale deviennent ainsi des objets d’étude souvent traités avec rigueur et sans manichéisme.
Grâce à Gaudin et Aleksic, nous abordons l’année 1916, troisième tome de l’histoire d’Un village français (Soleil). Ce roman policier mettant en scène de nombreux personnages présente un panorama des divers types sociaux et psychologiques d’un moment difficile, en plein cœur du conflit de 14-18. Le Naour, Marko et Holgado, eux, racontent Verdun (Bamboo) en deux épisodes, Avant l’orage et L’agonie du Fort de Vaux, chacun fort bien complété par un dossier de bon niveau ; on y voit également même la situation du côté allemand. De leur côté, Ordas et Mounier ont choisi, pour le septième tome de L’ambulance 13 (Bamboo), d’emmener leurs lecteurs parmi Les oubliés d’Orient, autrement dit sur un front non seulement méconnu mais également compliqué, du point de vue politique comme militaire.
Deux conséquences de cette guerre sont abordées de manière fort intéressante et différente. Ozanam, Rey — une des meilleures historiennes de la Russie — et Rodier font ainsi revivre Lénine (Glénat / Fayard) en accordant une assez grande place à la guerre de 14, qu’a su si bien exploiter l’exilé. Cossi, Djian et Varoujan se sont attachés à une des suites du génocide arménien, à savoir la Mission spéciale Némésis (Sigest) qui a organisé l’élimination de celui qui fut l’un des grands ordonnateurs du massacre.
Pour le second conflit, on retiendra deux approches concernant deux tragédies plus ou moins longues, superbement et finement racontées et mises en images. La première, La déconfiture (Futuropolis), permet à Pascal Rabaté, qui n’en livre ici que la première partie, de se pencher sur la débâcle de l’armée française en 1940 : ce maître du noir et blanc raconte, avec une grande économie de moyens mais avec profondeur, les conditions de l’immense gâchis et de l’incommensurable stupeur marquant ces quelques semaines. La seconde, Irena (Glénat), nous vaut déjà deux épisodes : Le ghetto et Les justes, absolument remarquables ; Morvan, Evrard, Tréfouël et Walter s’incrustent dans la Varsovie qui, à partir de 1941, réduit de plus en plus la place laissée aux Juifs : à travers une gentille petite dame catholique qui fait tout son possible non seulement pour aider les habitants du ghetto mais aussi pour en faire sortir les enfants malgré les contrôles, en interne, de la police juive et, en externe, des autorités nazies, ils dépeignent avec réalisme et tendresse une situation qui semble complètement désespérée.
Gihé